EXPLOITATION MINIERE: APRES LE MALAISE, LA MINE DE TONGON PREPARE SA REOUVERTURE
jeudi, 23 août 2018 17:36
Plus d’un mois après l’arrêt total de l’exploitation industrielle de l’or
dans le nord de la Côte d’Ivoire, un lendemain meilleur se profile à l’horizon.
A 55 km de Korhogo, et précisément dans la sous-préfecture de M’Bengue, la
plus grande société d’exploitation de l’or a suspendu ses activités, depuis le
13 juillet. Et cela à la suite d’une grève déclenchée par une vingtaine de
travailleurs de la mine de Tongon, revendiquant, entre autres, sept (7) mois de
salaire sous forme de prime de production.
Cette crise a alors amené les dirigeants de Randgold resources à suspendre l’intégralité de leurs activités en mettant la société sous ‘’lock-out’’, conformément à l’article 82.3 de la Loi n°2015-532 du 20 juillet 2015, portant Code du travail de la Côte d’Ivoire.
Lequel article stipule que « le lock-out est la fermeture de tout ou partie d'une entreprise ou d'un établissement, décidée par l'employeur à l'occasion d'une grève des salariés de son entreprise ». Qui ajoute que « le lock-out est prohibé et n'est exceptionnellement licite que lorsqu'il est justifié par un impératif de sécurité ou lorsque la procédure de déclenchement de la grève n'a pas été respectée ».
Un dénouement progressif
La situation qui prévaut à Tongon préoccupe au plus haut niveau les dirigeants de la mine et le gouvernement ivoirien. Dans la mesure où l’Etat est actionnaire à 10% au capital social de cette société, conformément aux dispositions de la loi n°2014-138 du 24 mars, portant Code minier de la Côte d’Ivoire.
Fort heureusement, les pourparlers avec la médiation assurée par Ali Coulibaly Kader, député de M’Bengué, ont amené les grévistes à libérer le site d’exploitation de l’or à Tongon, depuis la semaine dernière. Une équipe de spécialistes est sur le terrain pour faire l’évaluation des dégâts causés par cet arrêt brusque de tout le dispositif d’extraction de l’or.
La carrière, elle, a été inondée et des spécialistes s’évertuent à l’évacuer progressivement. Interrogé, Bodiel N’Diaye, directeur général de Randgold Côte d’Ivoire rassure. « Nous sommes au point des travaux de contrôle, de maintenance des équipements et de remise en état de fonctionnement de l’usine ». Mais, il ne s’est pas encore prononcé sur la date de la reprise effective de l’exploitation de l’or dans le nord du pays.
Des éclairages
Lors d’une rencontre avec la presse, le 3 août au siège de la société à Cocody, le manager de la compagnie a donné des éclairages. « Sur les 26 points formulés par les grévistes (entre 20 et 30 travailleurs de la mine), nous avons apporté des éléments de réponse à la quasi-totalité des revendications. Il ne restait que deux points à savoir le système de rotation des travailleurs et la question des primes de production », a expliqué Bodiel N’Diaye. Et d’ajouter: « au moment où nous étions en train de mener les négociations, nous avions été surpris le 13 juillet par la réaction des grévistes qui ont arrêté tout le système de production de l’or et demandé à tout le personnel, à l’exception des expatriés, de quitter le site d’exploitation de l’or à Tongon ».
Le fond du problème
Il s’agit de la prime de production qui revient chaque fois que les travailleurs font des revendications. Le Dg de Randgold, lui, explique que « la prime de production n’est payée que lorsque l’objectif fixé par la direction générale est atteint (…) ». Mais, selon une source bien introduite, les grévistes estiment que la direction a mis la barre à un niveau tel que les travailleurs n’arrivent pas à l’atteindre. Ce qui fait qu’ils n’ont jamais perçu cette prime depuis l’exploitation de la mine. Autre chose, les prévisions de la société parlent de la clôture de la mine en 2021. Ce qui constitue l’une des craintes de ceux qui ont enclenché le blocus, nous indique la même source.
Face à cette situation, les responsables de cette mine affichent un réel optimisme. « Randgold est déjà très engagé à fond dans l’exploration pour étendre la durée de vie de la mine et/ou trouver un nouveau gisement devant remplacer Tongon. L’objectif est d’augmenter le niveau de réserves évalué à 1,1 million d’onces au 31 décembre 2017 », rassure Alain Kouadjo, le directeur du département Mineral resources de la société minière.
Le directeur général, lui, a saisi l’occasion pour parler des autres avantages que la société offre à ses travailleurs, en guise de compensation. A l’instar de la prime de rendement et la prime de motivation instaurées depuis février 2017. En plus des primes de salissure, des indemnités de transport et de logement, des prêts octroyés (le fonds social géré par les employés), etc. qui existent depuis longtemps. « C’est un ensemble de choses que nous donnons aux travailleurs mais les gens se focalisent toujours sur cette affaire de prime de production », dit-il.
Sans compter le fonds de fermeture de la mine, il y a une épargne faite par la société pour récompenser les travailleurs qui auraient contribué au développement de la mine. A cela s’ajoutent les investissements en faveur des communautés villageoises estimés à plus de 5,6 milliards de Fcfa depuis la création de la mine, dont 459,5 millions de Fcfa au cours du premier semestre 2018.
D’énormes préjudices
Cet arrêt de travail cause des dommages considérables. « Du 13 juillet jusqu’à maintenant, les pertes sont évaluées à environ 22 millions de dollars américains (l’équivalent de 12,1 milliards de F Cfa) », a indiqué le Dr Mark Bristow, le président directeur général de Randgold resources. C’était à l’occasion d’une conférence de presse, le 30 juillet, à Sofitel Hôtel Ivoire à Abidjan.
Il a révélé de réelles menaces sur l’environnement à cause de l’arrêt de la production, ne respectant pas les procédures normales et l’incapacité de spécialistes à traiter les produits chimiques évacués. A cela s’ajoutent les salaires du mois de juillet qui n’avaient pas encore été payés (à la mi-août).
Faute du dispositif informatique de la mine qui était hors d’usage, 670 employés (dont 38 expatriés) se retrouvent ainsi sans salaire. Sans ignorer les 1 008 travailleurs issus des sociétés sous-traitantes. A l’instar de la Tongonaise de mines (Tomi) en charge de l’exploitation de la carrière et Maxam (qui gère les explosifs) qui ont, elles aussi, été obligées de mettre leurs travailleurs en chômage technique.
Le malaise va plus loin
La production de d’or à Tongon va être nécessairement impactée. En effet, l’entreprise avait déjà revu à la baisse sa prévision de l’année de 300 000 à 290 000 onces, suite à un premier mouvement de grève en mai 2018.
Sur la base du cours de l’once (environ 31,10 g.), fixé à 1 187 dollars Us à la bourse de Londres, le 14 août, Randgold CI devrait perdre 11,87 millions de dollars, soit plus de 6,528 milliards de Fcfa. Avec la nouvelle grève, elle sera obligée de revoir une fois de plus sa production à la baisse.
Sachant qu’elle était à 288 680 onces produites en 2017. Cette grève va assurément affecter le résultat de fin d’année de la société. Qui a commencé à verser des dividendes à ses actionnaires, plus de 11 milliards de Fcfa pour l’exercice 2016 et 13 milliards de Fcfa l’année d’après. Qu’en sera-t-il à la fin de 2018 ?
Les miniers ne sont pas les seuls impactés. Car, selon Dr Mark Bristow, « la mine de Tongon est le plus gros consommateur d’électricité en Côte d’Ivoire. Et nous payons des factures allant de 500 millions jusqu’à 1 milliard de Fcfa par mois à la Compagnie ivoirienne d’électricité (Cie) ».
A l’international, les remous à Tongon pourraient également jouer sur les titres de cette société cotée à la Bourse de Londres (elle fait partie des indices Ftse 100) et à ‘’The Nasdaq stock market’’ à New York aux États-Unis.
Affaire à suivre…
https://www.fratmat.info/index.php/economie/exploitation-miniere-apres-le-malaise-la-mine-de-tongon-prepare-sa-reouverture
Cette crise a alors amené les dirigeants de Randgold resources à suspendre l’intégralité de leurs activités en mettant la société sous ‘’lock-out’’, conformément à l’article 82.3 de la Loi n°2015-532 du 20 juillet 2015, portant Code du travail de la Côte d’Ivoire.
Lequel article stipule que « le lock-out est la fermeture de tout ou partie d'une entreprise ou d'un établissement, décidée par l'employeur à l'occasion d'une grève des salariés de son entreprise ». Qui ajoute que « le lock-out est prohibé et n'est exceptionnellement licite que lorsqu'il est justifié par un impératif de sécurité ou lorsque la procédure de déclenchement de la grève n'a pas été respectée ».
Un dénouement progressif
La situation qui prévaut à Tongon préoccupe au plus haut niveau les dirigeants de la mine et le gouvernement ivoirien. Dans la mesure où l’Etat est actionnaire à 10% au capital social de cette société, conformément aux dispositions de la loi n°2014-138 du 24 mars, portant Code minier de la Côte d’Ivoire.
Fort heureusement, les pourparlers avec la médiation assurée par Ali Coulibaly Kader, député de M’Bengué, ont amené les grévistes à libérer le site d’exploitation de l’or à Tongon, depuis la semaine dernière. Une équipe de spécialistes est sur le terrain pour faire l’évaluation des dégâts causés par cet arrêt brusque de tout le dispositif d’extraction de l’or.
La carrière, elle, a été inondée et des spécialistes s’évertuent à l’évacuer progressivement. Interrogé, Bodiel N’Diaye, directeur général de Randgold Côte d’Ivoire rassure. « Nous sommes au point des travaux de contrôle, de maintenance des équipements et de remise en état de fonctionnement de l’usine ». Mais, il ne s’est pas encore prononcé sur la date de la reprise effective de l’exploitation de l’or dans le nord du pays.
Des éclairages
Lors d’une rencontre avec la presse, le 3 août au siège de la société à Cocody, le manager de la compagnie a donné des éclairages. « Sur les 26 points formulés par les grévistes (entre 20 et 30 travailleurs de la mine), nous avons apporté des éléments de réponse à la quasi-totalité des revendications. Il ne restait que deux points à savoir le système de rotation des travailleurs et la question des primes de production », a expliqué Bodiel N’Diaye. Et d’ajouter: « au moment où nous étions en train de mener les négociations, nous avions été surpris le 13 juillet par la réaction des grévistes qui ont arrêté tout le système de production de l’or et demandé à tout le personnel, à l’exception des expatriés, de quitter le site d’exploitation de l’or à Tongon ».
Le fond du problème
Il s’agit de la prime de production qui revient chaque fois que les travailleurs font des revendications. Le Dg de Randgold, lui, explique que « la prime de production n’est payée que lorsque l’objectif fixé par la direction générale est atteint (…) ». Mais, selon une source bien introduite, les grévistes estiment que la direction a mis la barre à un niveau tel que les travailleurs n’arrivent pas à l’atteindre. Ce qui fait qu’ils n’ont jamais perçu cette prime depuis l’exploitation de la mine. Autre chose, les prévisions de la société parlent de la clôture de la mine en 2021. Ce qui constitue l’une des craintes de ceux qui ont enclenché le blocus, nous indique la même source.
Face à cette situation, les responsables de cette mine affichent un réel optimisme. « Randgold est déjà très engagé à fond dans l’exploration pour étendre la durée de vie de la mine et/ou trouver un nouveau gisement devant remplacer Tongon. L’objectif est d’augmenter le niveau de réserves évalué à 1,1 million d’onces au 31 décembre 2017 », rassure Alain Kouadjo, le directeur du département Mineral resources de la société minière.
Le directeur général, lui, a saisi l’occasion pour parler des autres avantages que la société offre à ses travailleurs, en guise de compensation. A l’instar de la prime de rendement et la prime de motivation instaurées depuis février 2017. En plus des primes de salissure, des indemnités de transport et de logement, des prêts octroyés (le fonds social géré par les employés), etc. qui existent depuis longtemps. « C’est un ensemble de choses que nous donnons aux travailleurs mais les gens se focalisent toujours sur cette affaire de prime de production », dit-il.
Sans compter le fonds de fermeture de la mine, il y a une épargne faite par la société pour récompenser les travailleurs qui auraient contribué au développement de la mine. A cela s’ajoutent les investissements en faveur des communautés villageoises estimés à plus de 5,6 milliards de Fcfa depuis la création de la mine, dont 459,5 millions de Fcfa au cours du premier semestre 2018.
D’énormes préjudices
Cet arrêt de travail cause des dommages considérables. « Du 13 juillet jusqu’à maintenant, les pertes sont évaluées à environ 22 millions de dollars américains (l’équivalent de 12,1 milliards de F Cfa) », a indiqué le Dr Mark Bristow, le président directeur général de Randgold resources. C’était à l’occasion d’une conférence de presse, le 30 juillet, à Sofitel Hôtel Ivoire à Abidjan.
Il a révélé de réelles menaces sur l’environnement à cause de l’arrêt de la production, ne respectant pas les procédures normales et l’incapacité de spécialistes à traiter les produits chimiques évacués. A cela s’ajoutent les salaires du mois de juillet qui n’avaient pas encore été payés (à la mi-août).
Faute du dispositif informatique de la mine qui était hors d’usage, 670 employés (dont 38 expatriés) se retrouvent ainsi sans salaire. Sans ignorer les 1 008 travailleurs issus des sociétés sous-traitantes. A l’instar de la Tongonaise de mines (Tomi) en charge de l’exploitation de la carrière et Maxam (qui gère les explosifs) qui ont, elles aussi, été obligées de mettre leurs travailleurs en chômage technique.
Le malaise va plus loin
La production de d’or à Tongon va être nécessairement impactée. En effet, l’entreprise avait déjà revu à la baisse sa prévision de l’année de 300 000 à 290 000 onces, suite à un premier mouvement de grève en mai 2018.
Sur la base du cours de l’once (environ 31,10 g.), fixé à 1 187 dollars Us à la bourse de Londres, le 14 août, Randgold CI devrait perdre 11,87 millions de dollars, soit plus de 6,528 milliards de Fcfa. Avec la nouvelle grève, elle sera obligée de revoir une fois de plus sa production à la baisse.
Sachant qu’elle était à 288 680 onces produites en 2017. Cette grève va assurément affecter le résultat de fin d’année de la société. Qui a commencé à verser des dividendes à ses actionnaires, plus de 11 milliards de Fcfa pour l’exercice 2016 et 13 milliards de Fcfa l’année d’après. Qu’en sera-t-il à la fin de 2018 ?
Les miniers ne sont pas les seuls impactés. Car, selon Dr Mark Bristow, « la mine de Tongon est le plus gros consommateur d’électricité en Côte d’Ivoire. Et nous payons des factures allant de 500 millions jusqu’à 1 milliard de Fcfa par mois à la Compagnie ivoirienne d’électricité (Cie) ».
A l’international, les remous à Tongon pourraient également jouer sur les titres de cette société cotée à la Bourse de Londres (elle fait partie des indices Ftse 100) et à ‘’The Nasdaq stock market’’ à New York aux États-Unis.
Affaire à suivre…
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