ABUS SEXUEL SUR ENFANTS ET SILENCE



Il est évident qu’on ne peut contrer cette violence que constitue la maltraitance sexuelle tant que l’on n’en connaît pas l’existence» (Lajudie)
Pourtant la réalité nous confronte à un mur de silence érigé par les victimes face à aux abus : «Au moment où elles subissent des violences sexuelles, 56 % des victimes» gardent le silence. Ce silence peut être permanent ou temporaire. «Un enfant qui parle de sa victimisation sexuelle est celui pour lequel les facteurs poussant au secret ne jouent pas ou plus.» Lajudie donne l’exemple de l’enfant qui prend conscience de la nature abusive de ces rapports grâce à des programmes d’éducation sexuelle.
En partant de cette idée, «une connaissance des différentes raisons pour lesquelles un enfant peut préférer garder le silence (...) est essentielle si l’on veut détecter les cas de maltraitance sexuelle suffisamment tôt pour pouvoir la stopper». Ainsi, de Lajudie interroge les motivations du silence auprès de 69 enfants et adolescents qui ont été abusés sexuellement et elle propose 3 catégories de facteurs à partir du vécu de ces enfants.
  • Des facteurs dépendants de l’enfant: sa personnalité, ses expériences antérieures, son stade de développement; sa méconnaissance de la sexualité, qui fait qu’il ne sait que beaucoup plus tard que ce qu’il subit est mal (la prise de conscience peut s’étaler sur 10-20-30 ans); ses capacités de communication et son ouverture aux adultes; les oublis qui subsistent face à ces épisodes; ses sentiments de responsabilité et de culpabilité ; «la peur de l’humiliation, de la stigmatisation,»; ...
  • Des facteurs liés aux épisodes de maltraitance et à l’agresseur: l’attachement préalable à l’agresseur; la coercition et les menaces: «la peur de voir l’agresseur mettre sa menace à exécution, menace qui l’assure du silence de l’enfant : menace de tuer la mère, de se tuer, menace de l’abandonner...»; le poids des émotions, la situation est trop pénible pour pouvoir en parler; les cadeaux ou les privilèges, la séduction, le mensonge, la pitié, ...de la part de l’abuseur; ...
  • Facteurs liés au milieu de soutien de l’enfant et surtout la perception qu’il en a: «les qualités du milieu de soutien n’entrent en jeu que de façon indirecte, à travers la perception qu’en a l’enfant et en fonction des conclusions qu’il tire sur ce que sera la réaction de ce milieu.»; si la famille vit des problèmes autres, il ne veut pas ajouter du stress aux parents; il veut protéger son environnement familial de l’horreur et se tait pour le préserver; la crainte que les adultes ne prennent pas au sérieux ces révélations; la crainte d’une réaction trop exagérée de la part des parents; ...
Le silence des enfants abusés est un phénomène complexe qui doit être pris en compte. Le dévoilement de ces situations est un élément de protection de l’enfant qui subit des violences. Il ne doit pas être confondu pour la parole à tout prix dans la démarche thérapeutique d’un enfant qui a été abusé sexuellement (voir Van Gijseghem et Gauthier; Bullens).

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