ENTENDRE L’ENFANT VICTIME DE VIOLENCES
Photo : Harvey K, flickr/creative common |
L’Organisation internationale de la francophonie (OIF) vient de faire œuvre très constructive en publiant un guide pratique sur l’audition et l’accompagnement des enfants victimes de violences. Jusqu’alors, elle avait publié des ouvrages sur les droits humains en général, mais pas encore spécifiquement sur les droits de l’enfant.
Le point de départ est certainement à rechercher dans l’étude mondiale sur la violence de 2006, qui a mis en évidence les innombrables formes de violence à l’égard des enfants et les difficultés à mettre en œuvre des mesures de prévention, d’enquête et de soins, et que très souvent les enfants victimes de ces violations de leur être, de leur intimité, de leur intégrité, de leur dignité et de leurs droits restent sans voix, muets, comme l’infans d’avant la Convention. Pourtant, la CDE lui a donné la parole et le pouvoir d’influencer les décisions qui le concernent, par le biais de l’art. 12...
Encore faut-il mettre en place les mécanismes pour recueillir l’opinion (les confidences) de l’enfant, pour établir la valeur de cette voix (la crédibilité des assertions) et pour éviter les manipulations, instrumentalisations, l’aliénation de cette parole. C’est donc un exercice très délicat, qui nécessite de bien connaître le développement de l’enfant, ses besoins et les exigences de son jeune âge et qui doit être effectué dans le respect de protocoles stricts, évitant la revictimisation de l’enfant, aussi traumatisante que la violence elle-même. C’est un domaine dans lequel, les sciences forensiques ont apporté une large contribution, notamment avec l’apparition de protocoles1 d’audition de l’enfant et les liens faits avec les recherches en neurosciences, en particulier sur la mémoire.
L’OIF a pris l’initiative de faire une étude des bonnes pratiques, en tenant compte des systèmes juridiques différents, des sensibilités, des cultures et des compétences dont devraient disposer les professionnels. Dès lors, ce guide se veut avant tout un outil et un instrument de diffusion des bonnes pratiques. Plutôt que de mettre en avant les cadres normatifs à appliquer en toutes situations, ce guide regroupe les pratiques existantes qui peuvent aider les professionnels travaillant avec les enfants et qui doivent à la fois les rassurer et les amener à dire, dénoncer, témoigner et libérer leur parole en toute sécurité. Il va plus loin aussi puisqu’il aborde la nécessité d’accompagner les enfants, c’est-à-dire de prévoir à leur intention des mesures de soins lorsque c’est nécessaire.
Ce guide a l’avantage de réunir l’expérience d’acteurs différents et de prendre en compte la diversité des situations de l’espace francophone. Il permettra aux professionnels de disposer d’informations fiables et adaptées, nécessaires à la protection effective de l’enfant.
Il a été initié par Mme Martine Anstett, sous-directrice à la Direction de la paix, de la démocratie et des droits de l’homme de l’OIF, décédée au cours de l’année 2015, à qui nous rendons hommage, et mis en musique par notre chère collègue Mme Claire Brisset, ancienne défenseure des enfants (France), qui montre ici ses talents de chef d’orchestre!
Il faut espérer que ce guide trouvera très vite une traduction dans les langues des NU pour avoir la portée qu’il mérite.
1 par ex. l’audition NICHD (National Institute of Child Health and Human Development; Lamb et ses collègues, 1996, 2008)
http://www.childsrights.org/actualites/editoriaux/1112-l-enfant-victime-de-violences
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